Assemblée nationale. Laurent Wauquiez remet une pièce dans la machine. Le député de Haute-Loire et figure de la droite parlementaire revient à la charge ce mercredi avec une proposition controversée : la création d’une commission d’enquête sur les connexions entre certaines figures politiques et des réseaux islamistes.
Une initiative qui suscite autant d’inquiétude que d’interrogations dans l’hémicycle, alors qu’elle vise implicitement les élus de La France insoumise (LFI), sans toutefois les nommer cette fois-ci. Dans les rangs de l’opposition comme au centre, nombreux sont ceux qui dénoncent une opération de communication déguisée.
Une cible à peine voilée
Après un premier rejet début juin en commission des lois, la droite parlementaire revient avec un texte modifié. Exit les références explicites à LFI dans l’exposé des motifs ; désormais, il est question de « certains responsables politiques » entretenant des relations supposées avec des sphères propageant une idéologie islamiste ou soutenant des actions terroristes.
Mais pour de nombreux députés, le message reste limpide. « Il ne s’agit ni plus ni moins que d’un procès politique contre un adversaire désigné », estime un parlementaire écologiste. Le texte devrait à nouveau être soumis au vote ce mercredi à 15 heures.
Une démarche qui divise
Pour ses partisans, la proposition relève d’un impératif républicain. « Il s’agit de faire la lumière, en toute objectivité, sur des zones d’ombre qui menacent notre cohésion nationale », plaide Éric Pauget, député LR des Alpes-Maritimes. À ses yeux, certains élus utiliseraient ces réseaux à des fins électoralistes, ce qui justifierait une enquête approfondie.
Mais la riposte est immédiate. Plusieurs groupes parlementaires dénoncent une instrumentalisation des commissions d’enquête à des fins partisanes. « Les critères de recevabilité ne sont pas remplis. Le texte est flou, partial et potentiellement redondant avec des procédures judiciaires en cours », tranche Léa Balage El Mariky (EELV), qui avait rendu un avis défavorable lors du premier examen.
Une manœuvre à double tranchant ?
Dans les couloirs du Palais Bourbon, certains y voient surtout une tentative de rebond pour un Wauquiez affaibli sur la scène interne des Républicains, récemment battu par Bruno Retailleau dans la course à la présidence du parti. « Il cherche un marqueur fort pour exister à droite. Mais à quel prix ? », glisse un élu centriste.
L’équilibre pourrait toutefois pencher en sa faveur cette fois-ci. Le premier vote s’était soldé par un parfait équilibre – 23 voix pour, 23 contre – et le Rassemblement national, qui soutenait l’initiative, n’était pas au complet ce jour-là. Quant à certains députés Renaissance, leur abstention pourrait évoluer.
Une commission aux contours flous, pour une démocratie sous tension
Derrière ce bras de fer se joue aussi la question du rôle et des limites des commissions d’enquête parlementaires. Destinées à contrôler l’action publique, elles deviennent ici le théâtre d’une confrontation politique directe, où l’opacité des intentions rivalise avec la gravité des sujets invoqués.
Si le texte venait à passer, la commission pourrait voir le jour dans les prochaines semaines. Mais le climat qui entoure son lancement laisse craindre qu’au lieu de faire la lumière, elle n’éclaire surtout les fractures qui traversent déjà profondément la vie politique française.